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Jardineries et réseaux de distribution Gérer les risquesphytosanitaires

Les jardineries, libres services agricoles, magasins de bricolage et grandes surfaces, sont des lieux où le matériel végétal a une place de choix dans le circuit de distribution. Les responsables de ces lieux de revente ont un rôle majeur à jouer en matière de surveillance des organismes nuisibles aux végétaux, y compris les parasites émergents et/ou réglementés.

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Des milliers de plantes et de produits végétaux destinés aux particuliers (semences, bulbes, arbres, arbustes, plants floraux et potagers, potées fleuries, plantes vertes, fleurs et feuillages coupés…) transitent par les jardineries et autres structures de distribution en France. Les responsables de rayons « pépinière », « marché couvert », « serre chaude » et « fleuristerie », ont une responsabilité essentielle à assumer sur le plan phytosanitaire, dont dépendent la valeur marchande du matériel végétal commercialisé et l’image de marque de chaque établissement. Qu’il s’agisse de maladies et de ravageurs communs ou de parasites réglementés, la vigilance est de mise. Le cas échéant, ces professionnels interviennent directement sur les plantes pour leur prodiguer les soins nécessaires au maintien de leur vitalité.

Les parasites émergents et/ou réglementés

Plusieurs végétaux destinés à la plantation (plants floraux, légumiers, aromatiques, fraisiers, pomme de terre ou bulbes à fleurs, arbres fruitiers, arbres et arbustes d’ornement, vigne de table…) sont potentiellement exposés à des organismes nuisibles réglementés (bactériose à Xylella fastidiosa, bactériose du kiwi, Phytophthora ramorum, sharka…). Certaines espèces végétales doivent parvenir en jardineries et autres lieux de revente avec un passeport phytosanitaire européen (PPE (1)), après la mise en œuvre du nouveau règlement européen en santé végétal. Les listes de bioagresseurs et de végétaux concernés par ce dispositif, mis en place depuis juillet 1993, ont évolué au fil des ans, suivant l’évaluation et la gestion officielles des risques phytosanitaires. Ces changements impliquent par conséquent une actualisation des connaissances des responsables de rayons chargés de la réception du matériel végétal. En principe, lors des contrôles réalisés par les SRAL (2) ou leurs délégataires (FREDON (3)) pour vérifier la circulation effective des plantes avec un PPE, les inspecteurs renseignent les professionnels sur la réglementation phytosanitaire en vigueur. Parmi les dernières exigences, figurent les mesures d’urgence destinées à éviter l’introduction et la dissémination de la bactériose à Xylella fastidiosa.

On comprend le bien-fondé de la réglementation phytosanitaire, tant sur le plan économique qu’environnemental, de même que l’obligation pour les revendeurs de maintenir une vigilance constante sur l’origine et la qualité sanitaire des végétaux. En cas de suspicion de détection d’un organisme nuisible émergent et/ou réglementé, les responsables de jardineries sont tenus d’effectuer leur signalement sans tarder (il s’agit en effet d’un danger sanitaire de première ou deuxième catégorie) au SRAL ou à la FREDON de leur région administrative. La remontée de filière s’appuie sur la traçabilité administrative du matériel végétal (bons de livraison, factures). Elle garantit l’efficience des mesures d’assainissement, jusqu’à la phase de production, en amont. Une enquête peut aussi conduire les autorités phytosanitaires à agir en aval. Par exemple, sur des lieux de revente de végétaux reconnus contaminés par des analyses officielles réalisées après leur contrôle dans un point d’entrée communautaire (PEC), tel que l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle ou le MIN de Rungis.

La chenille foreuse, appelée aussi teigne du bananier (Opogona sacchari) est un exemple de parasite réglementé, détecté sur certains lots de plantes vertes ou fleuries d’origine exotique. Les attaques sont d’ordinaire situées à la base des tiges, parfois au niveau des racines. À un stade avancé, les chenilles âgées (20-30 mm de long, tête brun rougeâtre, taches brunes sur le corps) rejettent leurs déjections à l’extérieur des parties lignifiées. Les constats d’infestation en France traduisent une certaine négligence des négociants en végétaux vis-à-vis de la réglementation phytosanitaire. Les plateformes d’achats belges et néerlandaises, où transitent chaque jour des milliers de plantes du monde entier, sont spécialement concernées par ce problème. Il en résulte le plus souvent des mesures d’éradication opérées sous l’égide des SRAL sur les lieux de revente des espèces sensibles : Ananas, Bambusa, Beaucarnea, Bougainvillea, Chamaedorea, Cordyline, Dieffenbachia, Dracaena, Ficus, Yucca, Musa, Pachira, Philodendron, Sansevieria… Pour suivre ce lépidoptère, il est judicieux en complément de l’observation visuelle des végétaux, de disposer un piège à phéromone sexuelle spécifique dans la serre chaude de chaque jardinerie pour capturer les papillons.

Surveiller, s’informer, se former

Hormis les bioagresseurs réglementés, qui sont rares par définition, une surveillance régulière et attentive des lieux de vente de végétaux permet de détecter d’éventuels foyers parasitaires. Parmi ceux rencontrés localement et ponctuellement, on peut citer les ravageurs suivants : aleurodes, chenilles, cochenilles, pucerons, thrips, ou tétranyques. Certaines maladies se manifestent aussi (chancres fongiques, oïdiums, rouilles ou autres maladies foliaires, pourritures racinaires dues à Fusarium, Phytophthora, Pythium, Rhizoctonia, Sclerotinia, Thielaviopsis…) sur des plants floraux ou légumiers (dont des fraisiers), des potées fleuries, des arbres ou des arbustes. Lorsqu’un foyer est détecté, le responsable du rayon doit intervenir afin d’enrayer son développement. Ces mesures complètent les actions de prophylaxie et de biocontrôle (voir encadré).

Pour mieux orienter leurs suivis, les responsables de rayons ont intérêt à consulter régulièrement les bulletins de santé du végétal (BSV) en productions horticoles ornementales, en JEVI (jardins, espaces végétalisés et infrastructures) et éventuellement, de façon complémentaire, en cultures légumières et en arboriculture fruitière. Ces publications, disponibles gratuitement sur les sites Internet des DRAAF, des FREDON et des chambres régionales d’agriculture, renseignent les lecteurs sur l’actualité phytosanitaire de manière précise, fiable et objective.

Il est même possible pour certains vendeurs de jardineries, de devenir observateur d’un réseau régional d’épidémiosurveillance Ecophyto et de contribuer ainsi activement à la collecte des données pour les BSV. Plus largement, certaines enseignes de jardinerie, libres services agricoles, magasins de bricolage ou grandes surfaces, maintiennent ou renforcent les compétences des personnels sur le diagnostic phytosanitaire grâce à des formations continues.

Jérôme Jullien

(1) Depuis le 1er octobre 2018 et jusqu’au 14 décembre 2019, le nouveau règlement européen en santé végétal date de UE 2016-2031 du 26 octobre 2016, les palmiers ne sont plus soumis à PPE vers les revendeurs, collectivités, paysagistes (sauf cas particulier des zones protégées), ni vers les particuliers.

(2) Services régionaux de l’alimentation du ministère de l’agriculture, chargés de la santé et de la protection des végétaux

(3) Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles.

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